- On ne reconnaît pas son monde?
En entendant ces mots, vous vous immobilisez. « Je connaîtrais ce maudit fatigant? » Vous vous retournez, dévisagez votre interlocuteur dont la franchise dans l'expression du visage vous convainc qu'il vous connaît vraiment. Puis tout à coup :
- Bin coudonc! c'est chose... (que vous vous dites à vous-même.)
Oui, oui, tsé chose... C'est quoi déjà son nom? Et l'autre, chose, ravi que vous l'ayez enfin reconnu, de passer en mode « voilà tout ce que j'ai fait depuis la dernière fois qu'on s'est parlé » .
Tout cela est fort intéressant... mais chose, son nom, c'est quoi? Oui, je suis bien content de le revoir et lui de me revoir, peut-être même un peu plus que moi. La gueule n'y arrête pas. Mais ma foi du bon yeu, il me raconte sa vie. On était si amis que cela nous deux? Et je ne me souviens pas de son nom? En même temps, je réalise que je ne peux pas l'arrêter de parler. Faut pas oublier non plus qu'on est dehors, qu'il fait frette, qu'il vente en 'tit péché, que ça fait déjà un boutte que je marche, que je commence à avoir hâte de revenir à la maison... Et chose, oui il est correct, oui je suis content de le revoir, mais chose, son nom déjà, c'est quoi?
Bon, il a fait le tour. Il recommence à bouger des pieds. La conversation achève. Il cherche à s'éloigner. Moi aussi. On se salue. Son nom, c'est quoi déjà? Je ne m'en souviens pas. Et de ne pas me souvenir de son nom fait comme si ce que chose m'a raconté ne m'intéressait pas vraiment.
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Je reviens à la maison. Je suis à l'ordi. Mon esprit est ailleurs. Soudain, ça me revient : je me souviens du nom du gars que j'ai croisé sur la rue tout à l'heure. Et ne me remémorant son nom, ché pas trop pourquoi, mais c'est à ce moment précis que ça m'a vraiment fait plaisir de l'avoir rencontré et qu'il me raconte où il en était rendu.
Daniel verret