Surface gazonnée au verdoiement plutôt jaune ocre,
Vent du sud-est agitant les branches bourgeonneuses des feuillus :
L’hiver a pris le large.
Quant à nous, on suit la file,
Exactement comme on le faisait du temps de l’école primaire,
En rangs deux par deux,
Des plus petits aux plus grands.
Le vent souffle.
Se bousculent, avant de s’échouer sur la page, les mots
Tandis que nos doigts vont et viennent sur les touches
Pour remplacer les lignes du premier jet qu’on avait effacées.
Un flux nous emporte.
S’ensuit un décollage!
Les mots nous pressent de taper
En nous arrachant à un malveillant état de contrition.
L’élan nous entraîne
En un lieu qui soudain s’évanouit
Lorsque nos doigts s’éloignent du clavier.
Où suis-je?
Juste là où pour nous le palindromique ici est.
Parce que,
En fait,
On ne sait plus trop bien où nous ont emporté nos mots.
Qu’importe!
On a décollé et rejoint notre station spatio-viscérale.
Arraché de notre léthargie matinale,
Nos mots de répondre à notre sollicitude
Afin de nous extirper de notre passé trop souvent triste,
Mortifère,
Parsemé de tant de frustrations,
De capitulations obligées.
Dehors,
Le soleil si, depuis quelques jours, présent assèche tout.
Déjà une sécheresse :
On ne comprend plus notre pays.
Tiens donc!
Nos doigts qui, encore une fois, oublient la tête qui commande.
On a l’impression de divaguer
Tout en cherchant notre équilibre au sommet d’immenses vagues.
Vagues
Que génère le temps
Et qui, en se retirant de la plage, y abandonnent pêle-mêle
Secondes, minutes, heures, semaines, mois et années.
C’est en ce lieu
Que s’est échouée notre barque
Longtemps après avoir décidé
De prendre le large.
Tout à coup : Ding! Dong!
Tintement des cloches enregistré qui du clocher
Résonne
Et nous conditionne
Alors qu’il était
Et sera
Ce temps
Qui est pour nous et qui diffère pour l’autre.
Dehors
Et hors de
Notre mélancolie,
Il fait tout de même encore très beau.
Mais comme on peine de ne pas jouer au plaignard
Alors qu’on tape,
Qu’on cherche d’une certaine façon à fuir,
À tout faire sauf écouter nos mots
Qui nous entraînent
Sans qu’on n’ait quoi que ce soit demandé.
On tape.
On continue.
On voudrait aussi comprendre
Pourquoi on ne va pas plus loin qu’une page par jour.
C’est peut-être en raison de la peur du vide de l’image réfléchie.
Il y a aussi que c’est long.
Voilà,
On achève.
Il nous faut maintenant relire
Et corriger.
Et c’est surtout cela qui est long,
D’autant plus qu’on déteste faire des fautes.
On désire aussi que nos mots
Soient lus
Sans jamais soulever
La moindre interférence
Chez le lecteur,
La moindre rupture dans l’élan de lecture.
Écrire plus d’une page par jour?
Tous les jours, ou presque?
Serions-nous capable?
Il faudra essayer.
Nadagami