Notre-Dame-Auxiliatrice-de-Buckland - 10
1) Notre-Dame-Auxiliatrice : portion nominative d'essence religieuse.
2) Buckland : portion nominative d'essence anglaise.
3) 10 : symbole numérique de l'essence de la langue française.
-- --
Quelques mois après mon arrivée à Notre-Dame-Auxiliatrice-de-Buckland, j'ai remarqué que souvent les gens à qui je m'adressais ne saisissaient pas pleinement tout ce que je leur disais. Dans leurs yeux, sur leur visage, par leur posture, je voyais bien que mes propos suscitaient chez les gens des interrogations, des malaises, une gêne, qu'on se gardait bien toutefois de me reprocher.
De mon côté, je savais que quelque chose accrochait. Par contre, ce léger désagrément n’a pas atténué le désir d’entrer en contact avec l’autre et ce, autant pour les gens du village que pour moi. Il est vrai aussi, et on comprend pourquoi avec le temps, que l’arrivée d’un étranger dans un village suscite la méfiance. Mais, je tiens à le préciser, la difficulté n’était pas de cet ordre.
Toujours est-il que, dans l’ensemble, les échanges que j’avais avec la majorité des gens étaient cordiaux. Puis un jour alors que, à l’épicerie, j’attendais en file pour passer à la caisse, j'ai pris le temps d'écouter les gens de la place parler entre eux tout en restant à l’écart des conversations. Parvenu à la caisse, j'ai dit à la caissière en poste :
- Vous parlez un beau français, vous, les gens de Buckland.
Mon commentaire a pris de court la caissière qui m'a alors jeté un regard pour me faire comprendre que j'avais peut-être perdu la boule. Sauf que non, ma boule était toujours bien en place. Et le problème c’était cela : j’employais des mots anglais que les gens de la place ne comprenaient pas. Ici, l’usage du français est plus marqué, et la langue française plus épurée et plus instinctive. Probablement aussi que le français en usage ici relève davantage d’une langue française plus ancienne que la langue française reconnue comme étant le bon français actuel. À Notre-Dame-Auxiliatrice-de-Buckland, il ne tombe pas de la neige mais bien de la nége. Le village est souvent balayé par le vent du su. Quand le temps se rafraîchit, on dit que ça renfreidit. Ca pigrasse dans le coin et ça chante [une] pouille(s).
Suite à ce constat, je me suis appliqué à éviter les mots anglais tout en tenant compte de la possibilité que mon français soit différent de celui des gens de la place. J'ai fait des efforts et en agissant ainsi, il est arrivé ce que j'espérais qu’il arrive :
- le malaise qui s’immisçait dans les conversations que j’avais avec les gens s’est dissipé graduellement.
Enfin, tout cela pour dire que les portions nominatives d'essence religieuse et anglaise qui composent le nom du village ne m'ont pas influencé, ne m'ont pas amené à changer des habitudes, des comportements, des manies. Par contre, l'absence de portion nominative d'essence française dans le nom du village mais qui est mise de l'avant grâce au parler des gens du village m'a obligé à soigner davantage ma langue maternelle parlée et écrite.
En somme, c'est ce qui n'est pas dit littéralement dans le nom du village qui m'a le plus influencé depuis que je vis à Notre-Dame-Auxiliatrice-de-Buckland.
-- --
Enfin, la question :
- Pourquoi le nombre 10 symbolise-t-il l'essence de la langue française?
Note 1 : il faut voir le panonceau ci-haut photographié comme une image sortie d’un rêve.
Note 2 : je le reconnais, c’est loin d’être évident.
Daniel verret