Derrière,
À gauche autant qu’à droite,
Au-dessus comme en dessous,
Toujours s’étire une droite
Qui va au-delà
De l’imaginable
Bien que nous tenaille l’envie de l’exprimer
Sur la blancheur limitée de la surface rectangulaire,
Sans arrêt en mode réceptivité
Pour qu’y soient imprimées les lettres correspondantes
Aux touches enfoncées les unes à la suite des autres.
Pendant ce temps,
Cherche le soleil à percer
Le mince filet d’humidité en suspension au-dessus du village
Qui tend à s’évanouir
À mesure qu’augmente le nombre
De pots de fleurs et de plants de tomates
Sortis de la maison et déposés par la suite sur la pelouse
Longeant le mur extérieur des remises arrière.
De retour dans la cuisine,
Nous voilà de nouveau confronté
À la ligne non écrite à venir
Qui nous rappelle le vide,
Le rien,
Si profond,
Si insondablement profond
Qu’on en vient tout de même à oublier
Et à agir comme s’il n’existait pas,
Alors que,
Hein,
Toujours est là ce vide.
Taper des mots,
Être confronté à la page blanche,
Voir les mots naître,
Ignorer vers où nous entraîne la vie
Faite
De lignes droites
Infinies
Et qui vont dans toutes les directions.
Mais en dépit
De cette réalité linéaire
Invisible
Mais obligatoirement là,
Il nous fallait vivre,
Il nous fallait voir le monde,
Il nous fallait être confronté à la méchanceté de l’homme,
Il nous fallait subir les contrecoups de la rapacité humaine.
En somme, il nous fallait avoir quelque vécu
Avant de pouvoir défendre l’idée
De la francoquébécité
Ou de la canadianité québécoise.
Jappe le chien d’à-côté.
Ma réalité est la suivante :
Je suis irréalité.
Du moins, c’est comme ça ce matin.
Demain?
On verra parce que,
Hein,
Être irréalité c’est quand même quelque peu compliqué.
Le chien d’à-côté d’encore japper.
Le mince couvert nuageux?
Il n’est plus.
La lumière du jour,
Accompagnée de chaleur,
S’échoue maintenant
Sans encombre sur le sol
Et s’y accroche.
Ainsi va la vie.
Du moins, c’est ce qu’on croit.
En fait,
On n’a rien à dire,
Rien à taper, rien à écrire,
Mais sans pour autant arrêter
D’enfoncer les touches du clavier
Parce qu’on fait quoi si on arrête?
Le temps passe
Et je tape.
M’en vais me raser.
Taper des mots... Quelle bizarrerie de la vie!
Nadagami