​Entre-deux.
Entre le froid
Et la chaleur.
Entre la glace
 
Et l’eau.
Entre la naissance
Et la mort.
Entre le rêve
 
Et la réalité
Entrent
Le rêve
Et la réalité.
 
- --- -
 
Parfois,
Il arrive
Que rien
N’arrive,
 
Qu’une chose
Et son contraire
Fusionnent
Pour ne former
 
Qu’un.
Soudain,
Cet avant-midi
J’ai ressenti
 
La présence
De l’absence.
À peu près en même temps
Flottait au-dessus
 
Des restes d’une longue lame de neige
Une masse vaporeuse qu’une brise légère
Faisait valser.
Tantôt,
 
De cette lame de neige
Il ne restera rien.
Absence que deviendra cette lame de neige.
Et en la présence de son absence poussera l’herbe verte.
 
 
nadagami

​Fin d’après-midi,
Début de soirée.
En somme,
Heure du souper.
 
Et le soleil
D’échapper ses étincellements
Dans l’ouverture
Qui se dessine
 
Sous le couvert nuageux,
Accompagnées que sont ses brillances
D’importants épanchements de bleu
Qui séduisent l’oeil en quête de ravissements éphémères.
 
- --- -
 
On est un peu pressé.
Il y a beaucoup à faire.
Moins que ce matin,
Mais il en reste encore.
 
Et le ciel qui se dégage
Pour la première fois
De la journée.
Au moins,
 
Il n’a pas plu toute la journée.
Derrière,
La neige a beaucoup fondu.
Beaucoup et vite.
 
Dire que, la fin de semaine dernière,
On a fait le tour de la cour arrière
En marchant sur la neige
Qui ne laissait paraître aucune plaque de pelouse.
 
Aujourd’hui,
Vers le milieu de l’après-midi
Et à peine une semaine plus tard,
On peut presque faire le tour de la cour sans marcher sur la neige.
 
C’est comme cela par ici.
Un jour,
Il y a de la neige haut comme ça,
Oui, oui, haut comme ça,
 
Et le lendemain,
Bas comme ça.
Tellement que c’est bin juste si on ne cherche pas la neige.
Oui! Oui!
 
- --- -
 
Je sais,
Je beurre un peu épais
Mais de par icitte,
La neige fond vite.
 
 
nadagami

​Tantôt,
J’ai revu la vague.
Sa longue crête
Inégale
 
Se frottait
Aux nuages
Qui encerclaient
Ses sommets et auxquels,
 
Qui toujours l’encerclent,
La vague se frotte encore.
En principe
Et nous refusons
 
D’imaginer autre chose,
La vague devrait être
Encore là ce soir.
Je le souhaite.
 
C’est que j’habite
Tout en juste en bas,
Dans le creux
Qui la précède.
 
- --- -
 
Être si loin de la mer,
Si loin
De la ligne d’horizon
Bleue incurvée,
 
Tout en jouissant
De la beauté renversante d’une vague immense
Juste derrière chez soi,
Quelque part au milieu des terres enneigées.
 
- --- -
 
Être vague.
Imprécis.
Indécis.
Indéfini.
 
- --- -
 
Je suis vague
Et de déferler
Le ressac
De mon imprécision.
 
- --- -
 
Hier marbrée de blanc,
Bientôt verte,
Ensuite jaune orange rouge
Et enfin gris violacé.
 
Parfois pleine et entière,
Parfois sans crête,
Parfois, disparue,
Parfois, noire de nuit.
 
Vague immobile,
Saisie par le temps,
Pétrifiée,
Recouverte d’un couvert forestier
 
Qui change au rythme des saisons,
Parfois au rythme du travail des hommes,
Souvent au rythme de la météo,
Mais tout en étant : vague si bien définie.
 
 
nadagami

​Au loin sous la pluie,
Dans un champ
Tout en étant près de la forêt,
Ils sont au nombre de huit.
 
Quelques têtes relevées,
Des oreilles redressées
Et des museaux qui pointent
En direction de la route :
 
D'ici, on devine
Que certains sont sur le qui-vive
Alors que d’autres en profitent
Pour brouter.
 
Huit qu’ils sont.
Dispersés
Sans trop s’éloigner les uns des autres,
Ils ont tous pris place
 
Au milieu de plaques
De neige fondue,
Là où jonchent le sol
Les herbes
 
Mouillées et jaunies
Depuis peu
Libérées de la neige
Qui fond à une vitesse vertigineuse.
 
Toujours ici et là,
Devant,
Huit chevreuils.
Hier,
 
Au même endroit,
J’en avais compté deux.
Aujourd’hui, ils sont huit.
Demain?
 
Un nuage de brume
Flotte au-dessus
Du troupeau.
Ailleurs,
 
S’élèvent d’autres nuages de brume
Qui s’échappent
De longues cheminées de tôle.
Dans les cabanes,
 
On fait bouillir.
Pendant ce temps,
Dans les champs
Qui bordent les érablières :
 
Tombe la pluie,
Coulent les érables,
Fuit la neige,
Se risquent les chevreuils.
 
 
nadagami

Le froid
Dominant
De l’hiver
S’étiole.
 
Les gouttes
Ont chassé
Les flocons
D’hier.
 
- --- -
 
Le ciel
Est ennuagé.
Prévue
Et attendue,
 
À la neige
Encore
Au sol
Et que l’hiver
 
En déroute
A abandonnée,
Enfin la pluie
Se mêle.
 
Des filets d’eau
Jouent
À serpents
Et échelles
 
Sur les vitres
Extérieures.
Plus haut,
D’une toiture
 
À l’autre
Sautent
Les gémissements
Lugubres
 
Du vent venu
Des montagnes.
Et plus tard
Une fois soufflée

La lumière du jour,
Impose sa domination
La noirceur
De la nuit.
 
- --- -
 
Au réveil
Sous un ciel
Resté gris,
Le jour
 
A déjà repoussé
La nuit qui,
Pressée par la clarté,
S’attarde moins.
 
- --- -
 
Le printemps
S’incruste.
Les cours d’eau
Sont hauts
 
Et les champs ocrés,
Presque en entier
Libérés
De l’emprise de l’hiver.
 
 
nadagami

​Résonnent les mots
Que
Raisonnent
Les maux.
 
Pourquoi
Si souvent cette misère
Qui toujours
Me ramène à hier?
 
Et d’abandonner
Au vent du sud
Ces souvenirs délétères
Qui les emportera au-delà des mers.
 
- --- -
 
Un jour,
Je suis né
Et le décompte
De s’enclencher.
 
Ont donc passé les jours,
Les semaines,
Les mois et les années
Jusqu’à ce que
 
Je me réveille,
Étendu au milieu d’un champ.
Décontenancé sans pour autant être effrayé,
Je me redresse mais demeure assis parmi les herbes.
 
Je suis habillé en guenillou.
Autour de moi,
Vacillent légèrement des milliers de petites fleurs,
Toutes différentes les unes des autres
 
Et dont la couleur des pétales
Propre à chacune des fleurs
Éveille en moi
La prononciation rattachée à chacun des mots que je connais.
 
Je tourne la tête
Et aperçois à ma gauche,
Alors qu’elles sont tout près de moi,
Deux bernaches que ma présence n’incommode pas.
 
L’un des deux oiseaux fait le guet
Tandis que l’autre tête baissée fouine au travers des herbes.
Soudain, j’entends résonner en moi
La phrase suivante :
 
Mais
Tabernache!
Ce sont
Des bernaches.
 
Une fois la phrase entendue,
Le passage soudain d’une légère brise
Venue du sud me fait frissonner.
Mes yeux se ferment.
 
Lorsque je les rouvre,
Je suis assis face à l’écran de mon portable,
Les deux mains au-dessus du clavier
Et mes doigts qui enfoncent les touches.
 
Je me rends compte que du bout de mes doigts
Fuit la couleur des fleurs
Que j’avais vues dans le champ.
Je lève les yeux et à l’écran je lis :
 
Mais
Tabernache!
Ce sont
Des bernaches.
 
 
nadagami

​Il est tôt.
Déferle la lumière d’un début de journée
Tandis que se dissipe la nuit qui achève.
Derrière,
 
Encore blanchis de neige,
Les sommets arrondis
D’une vieille chaîne de montagnes.
Quatre cent cinquante millions d’années
 
Qu’elles auraient,
Les montagnes.
Tu te souviens, au début
Quand on a émergé?
 
Pas vraiment. C’est trop loin tout ça.
Quatre cent cinquante millions
D’hivers, de printemps, d’étés et d’automnes
Ont passé
 
Et la boule porteuse qui continue de tourner.
Derrière la maison,
Du temps aggloméré en une formation montagneuse
Et en bas de laquelle on aperçoit :
 
Dans les champs, des bernaches;
Dans les fossets, des carouges à épaulettes;
En plein vol au-dessus de la forêt, des colverts;
Sur un fil électrique, des crécerelles;
 
Effarouchés le long de la route,
Quatre dindons sauvages;
Seule et hésitante à l’orée d’un bois,
Une gélinotte huppée.
 
Droit devant, au nord,
De l’autre côté du fleuve,
Et d’ici on les voit très bien :
Les cousines.
 
Et sans doute comme là-bas,
Au pied des montagnes qui au sud bordent le village,
Sous un ciel
Dont le bleu se mêle à un voile blanc vaporeux :
 
La neige fond;
Les champs réapparaissent;
Les érables coulent;
Le débit des cours d’eau augmente;
 
Sur la rue Principale,
Les moteurs des voitures grondent;
Les motocyclistes
Sont déjà de retour.
 
Faisait beau comme aujourd’hui,
Tu te souviens,
Il y a de cela
Quatre cent cinquante millions d’années?
 
- --- -
 
Il est tôt
Et déjà la lumière du soleil qui se répand.
Une journée débute
Et première elle sera comme elles l’ont toutes été.
 
 
nadagami

​Tombe la lumière
Du jour et
Qu’arfrisent
Ses reflets.
 
Ouais!
Faque c’est ça :
Qu’arfrise la lumière du soleil
Pour qu’elle arvole tous bords tous côtés.
 
- --- -
 
Arfriser.
Un synonyme?
Arvoler.
Bin oui!
 
L’eau qui dégoutte du toit
Arfrise ou bedon,
Arvole
Tout partout.
 
Arfriser et arvoler
Sont de plus
Tellement synonymes
Que sur Word les deux mots sont soulignés en rouge.
 
Deux fautes.
J’écris deux mots que j’ai appris,
Deux mots qui sont couramment utilisés
Et l’ordi de me signaler deux emplois fautifs.
 
Bon! Bon! Bon!
Quand ça arfrise ou que ça refrise,
C’est que ce qui refrise
Va dans toutes les directions.
 
L’eau qui dégoutte du toit
Et qui au contact du sol arfrise ou refrise tout partout,
Cela signifie
Que les gouttes d’eau tombées du haut de la toiture
 
Éclatent et rejaillissent dans les toutes les directions
Lorsqu’elles entrent en contact avec le sol.
Pour ce qui est du soleil,
Ses rayons frappent la neige blanche qui
 
Par réflexion relance leur rayonnement.
La lumière du soleil arfrise,
Ou arvole dans toutes les directions
Comme si,
 
Au même titre que les gouttes d’eau
Qui tombent d’une toiture,
On était éclaboussé par la lumière du soleil
Réfléchie par la surface enneigée.

- --- -
 
Toujours est-il que le vent léger fait friser l’eau,
Qu’il la ride en surface.
Mais il est possible aussi pour le vent de faire refriser l’eau,
De la faire revoler, arfriser, arvoler dans toutes les directions.
 
 
nadagami

​Fait beau
Sous un ciel
Tout bleu.
Du nord,
 
Une brise
Légère.
Rebondit
Sur le blanc
 
De la neige
La brillance
D’un soleil
Hier encore timoré.
 
Enfin!
Une journée
De printemps,
La première vraie,
 
Qui se déverse
En onde de chaleur
Depuis longtemps
Souhaitée.
 
Pas de tuque
Sur la tête.
Manteau ouvert.
Il était
 
Grand temps
Que la chaleur
Arrive.
Mais que de neige
 
Encore
Au sol
Et comme on a hâte
D’oublier la blancheur froide,
 
De ne plus la voir.
L’hiver a été long,
La chaleur printanière,
Lambineuse.
 
Mais bon,
Ça prendra le temps
Qu’il faudra
Pour que la neige fonde.
 
Toujours est-il
Que présentement
Il fait très beau
À l’extérieur
 
Et que je peine
À taper.
C’est pourquoi j’y retourne.
Fait trop beau pour rester en d’dans.
 
 
nadagami

​Mauvaise année pour les sucres.
Ça ne coule pas fort.
Beaucoup de travail
Pour une récolte très ordinaire.
 
Par contre et enfin,
Le soleil est au rendez-vous.
Les montagnes sont réapparues.
Et le bleu du ciel itou.
 
Ça fait du bien
D’avoir autre chose
Au-dessus de la tête
Qu’un plafond gris neigeux.
 
De notre côté,
On profitera du beau temps
Pour se rendre à la cabane à sucre.
Ici et là, on fait bouillir.
 
Toutefois, la saison des sucres achève.
La chaleur s’en vient.
Le retour d’oiseaux l’annonce :
Hier, le long de la route,
 
Sur un fil électrique,
Une crécerelle d’Amérique.
Quand les crécerelles se pointent,
La chaleur suit.
 
Et quand la chaleur se pointe,
Les bourgeons sortent.
Sauf que pour les sucres,
L’émergence des bourgeons
 
Signifie la fin de la saison des sucres.
Le temps avance.
Oui, l’hiver s’accroche.
Sauf que la chaleur finira bien par arriver pour de bon.
 
Et quand elle arrivera
Elle débarquera tout d’un coup.
Mais bon,
Je ne suis pas acériculteur.
 
Par contre,
Ce sera une année à oublier
Pour les producteurs de sirop du coin :
Beaucoup de travail pour pas grand-chose.
 
 
nadagami