​Véritable première journée d’automne :
Nuageuse,
Pluvieuse par moments,
Sinon sombre et grise.
 
Souffle une brise du nord,
Constante mais légère,
Chargée d’humidité.
Dehors, on grelotte presque.
 
Il nous faut chauffer.
La maison,
Vieille,
Craque.
 
On se prépare
Pour l’hiver,
Sans y penser,
Sans l’oublier.
 
En somme,
On se conditionne
Parce qu’au contraire des oiseaux,
On ne part pas.
 
S’amenuise
La durée du jour;
S’étire
La durée de la nuit.
 
Pingre
Est notre inspiration.
Les bras croisés,
On attend les mots.
 
On fixe
Le coloris des feuilles
Alors que décline
La lumière du jour.
 
Notre humeur quelque peu maussade
Finira bien par passer.
La chaleur se répand dans la maison.
Tantôt, il y a aura le souper à préparer.
 
 
Nadagami

​Tantôt la pluie.
Et soudain,
On pense à autre chose,
Même à rien.
 
Il y a tant à faire.
Le temps passe.
Il y a tant d’affaires
Qui nous mènent à une impasse.
 
Les nouvelles on lit.
Quoi penser ensuite, on ne sait plus trop :
Ché pas,
Les féminicides,
 
Faudrait peut-être que,
Nous les messieurs...
En fait, faudrait, non pas peut-être mais sans aucun doute,
Qu’on se calme.
 
Parce que là,
Il faut le dire,
Une tendance nous amène à supposer
Que la violence a comme synonyme « homme ».
 
Ça ne va pas?
Va faire un tour.
Éloigne-toi.
Vaut mieux tout recommencer à zéro et être libre
 
Qu’être un zéro en dedans.
C’est dur.
La décision de l’autre fait mal.
C’est pire quand, en plus, les enfants refusent de voir leur père.
 
Je sais, j’ai connu.
Un jour,
Le rêve se brise.
Mais la liberté n’a pas de prix.
 
En-dedans,
Tu ne peux pas recommencer.
Libre?
Du temps, plutôt que d’en faire, on s’en donne.
 
 
Nadagami

​Hier soir,
Tout à coup,
Une pluie drue,
Tapageuse.
 
Tôt ce matin,
Une herbe
Perlée
De gouttes de rosée.
 
En ce moment
S’étirent vers l’ouest,
Fines, longues et tranchées,
Les ombres.
 
Temps magnifique.
Il nous faudra,
Tout à l’heure,
Marcher la cour.
 
Une masse nuageuse
A ingurgité
Les sommets
Qui se dressent derrière.
 
Tout à coup,
On voudrait fuir sans fuir,
Oublier l’oubli,
N’être pour naître.
 
L’automne,
En montagne,
Est toujours
Empressé.
 
Sont de plus en plus
Nombreuses à être
Jaunes, oranges et rouges
Les feuilles des érables.
 
Bleuité céleste
Franche.
Quelques rares branches feuillues
Sont prises de légers frissons.
 
 
Nadagami

​Une lumière du jour que l’automne réduit.
En même temps,
La chaleur des mois d'été qui s’enfuit,
Et pour longtemps.
 
Mais il faut en revenir,
Surtout qu’on a su en profiter
De ces semaines, aujourd’hui souvenirs,
Qui nous ont apporté tant de jovialités.
 
Et c’est quand même très beau
Toutes ces couleurs automnales des paysages
Dont le retour, pour nous, n’est pas nouveau,
Quoiqu'on s'émeuve toujours face au coloris des feuillages :
 
Sur le versant des montagnes là-bas,
Des bouquets entiers de feuilles rouges;
En raison du vent, en contrebas,
Des feuillages jaunes et orange qui bougent.
 
Tantôt, comme souvent il arrive, soudain
Est tombée la pluie.
Ensuite, tout aussi soudain
Le soleil dont la lumière sur le sol a relui.
 
Mais on ressent
Dans notre corps
Un besoin pressant
De résoudre un désaccord
 
Parce qu’en nous crie l’envie
De retourner
À ces jours alors qu’on était si ravi
Du beau temps et de la pluie prévue sans cesse ajournée.
 
Vraiment très beau il a fait
Au cours du dernier été.
Aujourd’hui toutefois, est en partie défait
L’enthousiasme qui nous a alors transporté.
 
Mais juste à y penser, nous voilà à rimer,
Emporté qu’on est, ces mots qu’on aligne
Pour peut-être mieux nous arrimer
Aux conditions auxquelles l’automne nous assigne.
 
 
Nadagami

​Agite tout à coup une pichenotte de vent,
Jusque-là pendant et immobile,
Un bouquet de feuilles d'érable aux couleurs automnales
Et marbré de feuilles encore vertes.
 
Toute la journée
Il fera beau.
Par contre, on sent, on devine, on perçoit que l’été s’en va
Et que l’automne le remplace.
 
La lumière du jour
Fuit plus tôt
Et plus tôt
La noirceur se répand.
 
On enfile une veste, un chandail
Avant de sortir.
L’herbe, touffue l'été, est maintenant clairsemée
Et son brin, moins fort.
 
Se dénudent
Les ramées.
Les merles d’Amérique
Ont disparu.
 
Les versants montagneux
Recouverts d’érables à sucre
Rayonnent
D’un foisonnement de couleurs impossibles mais vraies.
 
C’est l’automne,
Le glissement qui nous entraîne dans le creux de la vague des saisons.
Les nuits, comme les ombres, s’étirent plus longuement
Et les surfaces au sol le matin d’être perlées de rosée.
 
Il nous faut chauffer la maison,
Notre vieille maison,
Toute de bois à l’intérieur,
Peut-être trop grande pour d’aucuns, mais jamais assez pour nous.
 
Tout cela, c’était hier.
Ce matin, la bruine.
Ensuite après le dîner, la pluie.
Et tout à coup, juste avant son coucher, une percée de soleil.
 
 
Nadagami

​De rouge, de jaune et d’orange se colorent les feuilles hier vertes.
Mugit le vent.
Tout oublier de ce passé qui nous brûle les entrailles.
Rupture!
 
Et que cesse la crainte du silence.
Souffle le vent
Qu’on devine
Puisque invisible.
 
La désobéissance :
Oui, mais encore plus;
Repousser les peurs, les interdits et surtout les appels à la raison;
Un vide exaltant mais terrifiant aspire.
 
Trouver les mots et ensuite les taper,
C’est une chose;
Susciter un intérêt qui perdure,
Une autre.
 
S’entassent à l’abri les premières feuilles tombées,
Vrombit le vent,
Se déglinguent de leur majestuosité les fortes branches des arbres,
Tombera tantôt la pluie.
 
Fuir;
Oublier :
Se cristallise la pensée
Et la raison de s’émouvoir sans en comprendre la raison.
 
Écrire
Pour décrire :
L’invisible;
Le senti.
 
Tombe en ce moment
La goutte
Sur la terre
Desséchée.
 
Tombera dans quelques semaines
Un premier flocon
Sur le sol gelé
Et par la suite recouvert en entier de neige.
 
 
Nadagami

​Attendre les mots
Comme attend que coule
L’eau d’érable
L’acériculteur
 
Qui sait
Que viendront à couler les érables,
Mais sans savoir exactement
Quand.
 
Au contraire toutefois
De l’acériculteur,
Aussi appelé sucrier,
Le tapeux de mots
 
N’en vient à enfoncer les touches,
À regarder
Les lettres surgir
Sur la page blanche,
 
Que si, avant tout, rejoignent
Les touches
Par frôlement
Ses doigts immobiles tenus au-dessus du clavier.
 
Passent les secondes,
Tombent goutte à goutte
Les lettres
Et la chaudière, le seau, la page de se remplir.
 
Par la suite, il y a relectures
Au même titre que l’eau d’érable
Que fait bouillir le sucrier
Afin que par évaporation cette eau devienne sirop.
 
Par contre,
Pour le tapeux de mots,
Le printemps survient
Chaque fois qu’il appuie tout en douceur sur les touches.
 
Mais avant que naissent les mots,
Il se détend,
Accepte une fois de plus qu’il doit attendre,
Puis l’un de ses doigts enfonce une première touche.
 
 
Nadagami

​De nouveau ce matin,
Se prenant pour un soleil de nuit,
Haute, blanche, ronde,
La lune qui plonge où, ce soir, plongera et s’éteindra l’astre de jour.
 
Que sommes-nous
Sur cette planète dite bleue
Et sur laquelle
Nous ne pouvons manifester qu’un soupçon de conscience?
 
Tout est trop grand,
Sans fin,
Impossible à contenir,
Si impétueusement insaisissable.
 
La brise souffle.
On observe.
Tout au fond de la cour arrière,
La couleur vermillon des fruits des cormiers s’arrache du mur enfeuillé.
 
Hier, on a trouvé,
Tout près d’un fosset d’un rang de gravelle,
Un anneau fait d’acier, quelque peu rouillé, et soudée à celui-ci
La reproduction d’une jeune feuille encore quelque peu recroquevillée.
 
On n’a pu s’empêcher de ramasser l'anneau.
On est ce qu’on est,
Comme sera la première feuille de la plante
À naître de la graine qui la contient.
 
Sont agitées les ramées
Par l’invisibilité de la brise.
Parfois,
On veut oublier :
 
Tout et même l’oubli.
Le frigo chante.
Tantôt la pluie
Alors qu’on observe le vent qu’on ne voit pas.
 
Une journée compte : vingt-quatre heures.
C’est bien la seule chose que l’inflation ne parviendra pas
À réduire pour ensuite la revendre plus cher.
À moins que... Ouin! Tout dépend par quel boutte on prend ça.
 
 
Nadagami

​Six cents millions de dollars canadiens
Pour une séance de pédalage dans le vide.
Cette manie qu’ils ont de claquer le fric des contribuables
Comme si c’était le leur.
 
Boule de cristal :
Suis-je le plus beau, la plus belle,
Le plus fin, la plus fine,
Le plussse meilleur ou la plussse meilleure cheufff?
 
Nous, les électeurs, on parle une fois tous les quatre ans.
Sauf qu’on nous traite comme si on était des demeurés :
Non! tu ne signes pas.
Appose simplement un X dans l’une des bulles de ton bulletin de vote.
 
Et c’est bon pour quatre ans;
Deux ans, plus ou moins quelques mois,
Dans le cas
D’un gouvernement minoritaire.
 
Le vent souffle du sud.
Les ombres s’étirent depuis l’est sur le sol.
Tôt ce matin et juste avant de disparaître sous la ligne d’horizon,
La lune confrontait de sa pleine blancheur le soleil levant.
 
Se balancent au rythme de la brise
Les innombrables tentacules feuillus.
Depuis ses branches, le prunier bombarde de ses fruits le sol gazonné.
Une belle journée d’automne presque estivale se dessine.
 
Alors qu'on regarde ce qu'anime le vent qui souffle
Et tandis que nos doigts courent sur les touches,
Tout à coup de nous dire :
Si je pouvais être le vent,
 
Emporté je serais par mon propre souffle
Sans que jamais je ne m’essouffle même si par moment je m’arrête
Pour ensuite, toujours à ma guise, m’élever aussi haut que les nuages
Ou encore, survoler la planète bleue en planant au-dessus des océans.
 
Dehors,
Les feuilles des érables frissonnent... 
Vrombissent les moteurs des quatre-roues qui passent dans le chemin.
Eux, les quatrerou(es)istes, ils ont le don de me faire décrocher.
 
 
Nadagami

​On cherche les mots
Alors que ceux-ci se sauvent.
On cherche nos mots
Pour que ceux-ci nous sauvent.
 
Est-ce nous qui nous exprimons
Au moyen des mots
Ou sont-ce ces derniers
Qui s’expriment à travers nous?
 
Peut-être que la réponse tient des deux perceptions suggérées :
La personne s’exprime
Et
Le choix des mots consacrant l’exactitude de la pensée.
 
La lumière du jour se déverse dans la cour.
Le pare-brise de l’auto réfléchit large des reflets aveuglants.
Dernière journée de l’été calendaire :
Dernier jour peut-être aussi d’un gouvernement dont on ne veut plus.
 
On a hérité de notre père,
Qui était fils de cultivateur,
De l’habitude de regarder le vent qui souffle
Afin de deviner les conditions météo à venir.
 
Notre père nous a aussi appris,
Mais sans la moindre intention de sa part,
À prendre le temps de lire les nouvelles du jour,
Lui qui se cachait derrière les journaux pour éviter de nous parler.
 
C’est ainsi que, bien malgré lui,
Il nous a transmis le devoir nécessaire d’être bien informé.
Par contre et malgré toutes nos bonnes intentions,
On ne peut s’intéresser à tout et donc des choix s’imposent.
 
Ce matin,
On a droit à un vent du sud.
En principe,
De la pluie est à prévoir
 
Au cours des prochains jours,
Mais pluie qui devrait être accompagnée
De chaleur.
On verra bien.
 
 
Nadagami