Il a neigé.
Aujourd’hui,
Il fait chaud comme en été.
Poussent les fleurs,
Verdit la pelouse,
Bourgeonnent les arbres,
Sont de retour les hirondelles.
Jusqu’à Sainte-Claire
On s’est laissé emporter par la route ce matin.
Dans les bas, le long de la Etchemin,
On porte davantage le masque.
Dans les hauts,
On joue aux héros.
On devra prendre l’habitude du port, s’en accommoder,
Et faire montre de plus de rectitude.
Mais c’est un autre monde ici.
On est loin,
Haut,
Encerclé par la forêt et les montagnes.
Ici, on est plus près
Du ciel et des nuages quand il y en a,
Des étoiles la nuit venue même si on n’a jamais mesuré,
Et, vous pouvez nous croire sur parole, de la neige l’hiver.
Nous, on a grandi en ville.
Notre-Dame-Auxiliatrice-de-Buckland,
Ce n’est vraiment pas la ville.
En fait, c’est plutôt un quotidien le long d’une rue dite Principale.
C’est très différent de la ville.
Vraiment.
Mais comme la ville,
À sa manière la campagne est bruyante.
Ce lieu à la fois forestier et agricole
Qu'on imaginait beaucoup plus paisible avant notre arrivée,
Voilà qu'il se révèle à nous comme étant plutôt de type :
MOTEUR.
D’un autre côté,
À la campagne, on n’a pas le choix.
Pas de moteur,
Té pogné, isolé, emprisonné.
S'ajoutent à cette réalité ceux et celles qui viennent de la ville,
En char, en moto, en motoneige, en quatre-roues
Et qui ne font que passer.
Mais il y a qu’on leur rend la pareille car en ville il nous faut aller.
Aussi, à la campagne, il y a les odeurs.
On est pas mal dedans de ç’temps-ci!
Mais c’est beau dans le coin.
Très.
Comme tantôt ce le sera alors que,
Une fois le soleil couché,
Perdurera une large bande lumineuse
Jaune orange rouge
S’étirant d’est en ouest
Et flottant juste au-dessus des Laurentides,
Déjà plongées qu’elles seront dans la noirceur de la nuit
Et qu’on observa depuis le flanc nord de la Baleine.
Mais on se doit d’être honnête.
Il arrive,
Quand même assez souvent,
Que le village n’est que silence,
Surtout tôt le matin lorsque le jour se lève
Et que tranquillement s’étirent longues les ombres,
Que s’éteignent graduellement les étoiles,
Qu’éclatent de lumière réfléchie les façades des maisons.
En même temps,
Tout autour, le silence.
Tout autour, des arbres, des champs, des maisons,
Tout autour, une ligne d’horizon
Où se rejoignent
Le ciel et la forêt lointaine,
Et ligne d'horizon en deçà de laquelle du côté nord
On doit imaginer le Saint-Laurent qu’on ne voit pas,
Mais dans lequel se jettent quand même
Les eaux de nos rivières d’en haut,
Les eaux de nos ruisseaux d’en haut,
Les eaux de nos lacs d’en haut.
Ce matin, dans la cour d'à-côté, au-dessus des autos,
Des hirondelles.
La chaleur
Est donc enfin de retour.
Nadagami