Il est tôt.
Nous envahissent des scènes d’un passé impossible à oublier
Et qui nous font ressentir le poids des âges.
De l’autre côté de la vitre de la cuisine, souffle l’absence de vent :
Renaissent en nous les images du vol plané d’un aigle.
Demain, la pluie.
En ce moment, le bleu du ciel se mêle à une blancheur pluvieuse.
Les poignets menottés au clavier,
Nos doigts ne peuvent que sautiller d’une touche à une autre.
On peine à vivre
La discipline de l’écriture journalière :
Cracher des mots,
Y trouver parmi ceux-ci, tous les jours, un renouveau,
Accepter que parfois nos mots nous ennuient,
Avouer enfin ne pas en avoir toujours envie.
Les heures passent.
Se poursuit l’ennuagement du ciel.
Parfois (bien qu’il serait plus juste d’écrire « souvent »), on doute :
Écrire, c’est bien; mais cuisiner itou.
On y croit,
Mais en même temps,
On s’imagine, en guise de motivation :
Être l’exception et subir les contrecoups de cet infantile narcissisme;
Être la voix (plutôt qu’une voix parmi tant d’autres);
Être et trouver difficile d’avoir à être;
Et enfin, mettre de côté ce charabia plutôt exaspérant.
Des zones ombrées se mêlent à la couleur sable de l’herbe séchée.
Par ailleurs, la fixité des branches dénudées,
Le peu de différence des tons de couleur sous le ciel en partie ennuagé,
La froide blancheur des lames de neige pétrifiées par le gel,
L’omniprésente fixité de l’instant présent que génère l’absence de vent,
Toutes ces observations font qu’on se demande ce qu’on fait ici.
On pense déjà au printemps
Alors que l’hiver n’est pas officiellement commencé.
Quel déplaisir que de remplacer un moustiquaire par un châssis double!
Nadagami