Un jour, alors que je me tenais sur le pont avant de l'un des deux traversiers, parvenu au milieu du fleuve j'ai répété à voix basse : « Là où les deux rives se rapprochent » . Le temps de le dire que déjà je m'éloignais du point central de cette ligne invisible qui relie les deux rives.
Moment éphémère!
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Au cours de ma vie, le fleuve m'a beaucoup aidé. Ça peut paraître étrange de lire une telle chose mais, c'est vrai. Tous nous connaissons au cours de notre vie des périodes sombres. Pour quelle raison je l'ignore mais durant ces moments difficiles, guidé par je ne sais trop quoi, je me rendais toujours à pied au quai Paquet. Debout, du haut de ce rempart d'acier où s'amarrent parfois les navires, je regardais le fleuve couler. Puis, ne riez pas, je lui parlais.
Là où les deux rives se rapprochent; le fleuve d'un côté, moi de l'autre.
À regarder le fleuve couler, à lui révéler mes tourments, à demeurer silencieux un long moment une fois ma rage et mon dépit avoués, j'ai appris l'humilité, j'ai appris à me taire, j'ai appris me laisser emporter par le courant imparable du fleuve pour qu'il m'entraîne là où je devais aller mais que la peur, ma peur, m'empêchait de voir comme destinée.
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Là où les deux rives se rapprochent : Québec.
Aujourd'hui, même si je m'en suis éloigné, « il » est toujours près de moi dès que je pense à lui.
« Il » : le fleuve, là où les deux rives se rapprochent.
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Daniel verret